Découvrez comment Sœur Isabelle Digvidaï, Fille de Jésus au Cameroun, a pu mériter ce surnom. Partagez sa joie de servir le Seigneur en travaillant à la réinsertion des enfants des rues de Ngaoundéré.
En plus de ma mission à la communauté de Bini Dang, maison de formation, maintenant postulat, j’ai travaillé au départ comme coordinatrice de la Caritas et aujourd’hui, d’une manière spécifique responsable du CEDER (Centre d’Ecoute des Enfants de la Rue) du diocèse de Nagaoundéré. Le lundi, mardi et jeudi, je prends la route de la ville avec la force qui m’anime et le soutient de toute la communauté à la rencontre des enfants « de la rue » ou « dans la rue ».
La plupart des personnes sont sensibles à la situation des enfants de la rue. Cependant, sans vraiment saisir ce phénomène à cause de sa complexité dans tous les sens, il crée une confusion quant à sa compréhension totale. Quelquefois, l’analyse émotionnelle prend le dessus : les gens ne comprennent pas comment et pourquoi un petit garçon de moins de 10 ans peut se retrouver dans la rue.
Lutter contre les idées fausses
De manière précise, cet étonnement parcourt le monde et c’est ce que j’expérimente dans ma mission au CEDER. Depuis 2015, beaucoup de gens ne comprennent pas comment je mène cette activité de coordonner un centre des enfants aussi difficiles, turbulents et « dangereux ». Plusieurs personnes croient que je cautionne les mauvais actes de ces enfants. Loin de là, il s’agit simplement d’aménager quelques stratégies appropriées pour maintenir leur éducation. Faites-en un tour dans ce centre et vous verrez !
En effet, j’ai reçu officiellement par la population de Ngaoundéré le nom de « la maman des bandits ». Les enfants de la rue sont considérés comme des brigands : ceux qui volent, violent, violentent, font la prison, tuent …. Tout ce qui n’est pas bien est leur métier selon ceux qui les regardent de l’extérieur. Ca arrive aussi parce que mon lieu de travail n’est pas fixe : je descends à la gare ferroviaire, dans les bars ou les restaurants, dans les agences de voyage, sur les marchés, bref vraiment dans la rue pour les rencontrer. Ils me connaissent en grand nombre et m’appellent même lorsqu’il est difficile aux autres de m’apercevoir ou de me remarquer.
Or ces êtres, au fur et à mesure que je vis avec eux, j’apprends à les connaitre et je découvre qu’ils portent une « Vie pleine d’espérance et un futur plein de réussite ». Le plus grand secret pour celui ou celle qui travaille pour la récupération de ces enfants, est d’apprendre à les aimer tout simplement.
Vivre notre charisme
C’est ce qui m’anime tous les jours. Notre charisme d’honorer l’Humanité Sainte du Fils de Dieu (Règle de Vie no 3) me poursuit et m’habite pour allumer chaque jour ce feu de la charité que Jésus est venu allumer sur la terre (Règle de vie no 2). Pour moi, ces enfants sont d’abord des créatures bien aimées, créées à l’image de Dieu comme chacun de nous. Ils ont aussi droit de se sentir aimés. Comme Fille de Jésus, je suis appelée à agir à la manière de Jésus, à poser des gestes qui ressemblent à ceux du Christ. Ceci me permet d’entrer dans les sentiments de Jésus devant les personnes marginalisées, considérées comme impures, immorales ou indignes.
Comme Fille de Jésus animée par le désir de mettre l’homme debout, je m’engage pour eux, avec une certaine qualité de cœur qui ne se traduit pas forcément par mes diplômes, mon savoir-faire, mais avec le sens de l’accueil, du respect, de l’écoute, et celui de la réalité.
Aider à restaurer leur dignité
Avec ces enfants, je ne cesse de demander au Seigneur la grâce de multiplier en moi ses gestes de miséricorde pour que ma présence auprès d’eux soit une présence d’amour, un amour qui protège ces enfants contre les dangers que les « normaux de la société » peuvent leur infliger, souvent sans preuves. Ce mépris et cette hostilité que leur manifeste la société les enfoncent toujours hors de la vie sociale et accentuent leur propre réaction de sécession, dont ils peuvent difficilement sortir seuls. Ils n’ont pas de voix et ne sont pas considérés. Il y a de quoi être la « maman de ces bandits » afin de tenir le flambeau de l’humanité pour redonner la dignité à ces biens aimés de Dieu.
La rencontre mutuelle avec ces enfants est une grande joie car à mon arrivée, ils accourent tous vers moi, tous sales, et m’embrassent. Ils ne se préoccupent pas si je suis propre ou bien habillée. Leur souhait est de me toucher chacun à son tour, ils ne trouvent pas de barrière.
Toute personne a le droit de s’épanouir
Ce travail auprès de ces « faibles » m’a ajouté une plus-value et m’est utile aujourd’hui. Il m’a permis d’apprendre à m’aimer personnellement avec mes fragilités. Il me donne le goût de lire, de collaborer, et d’entrer en relation avec les personnes rejetées, en particulier celles qui ont subi des violences sexuelles. Ceci me pousse à travailler davantage avec les prostituées, les victimes de l’initiation et de l’excision. Tout ceci pour sauvegarder la dignité humaine en visant l’épanouissement de toute personne crée à l’image et à la ressemblance de Dieu.
Sr Isabelle Digvidaï fj
Bini Dang, Cameroun
Bravo Isabelle! Ton témoignage me touche beaucoup. Je reconnais en toi une vraie Fille de Jésus. Poursuis avec joie et courage ta belle mission.
Isabelle, je suis entrain de suivre une session sur “le mystère pascal, secret de la vie religieuse”. En lisant ton article, tu nous donnes une réponse de vie à ce que j’assai de comprendre de la mort et résurrection de Jésus qui à travers la croix a vécu le rejet, l’insulte, la mort, provoquée par les siens.
merci de le vivre à ta manière dans la prise en compte de ceux qui sont considérés comme revu de la société.
les aimer, c’est ton arme, merci nous prions avec toi pour eux
Merci à toi, Isabelle,pour ce beau témoignage que j’ai lu avec intérêt….Tu es une “vraie” Fille de Jésus, par cet amour que tu donnes à ces enfants des rues….Merci de nous l’avoir partagé….Je vous prends dans ma prière….Maryvonne de Vannes…
oui, grand Merci Isabelle pour ton témoignage qui touche les novices! C’est un “honneur” pour toi, pour nous, d’être appelée la “maman des petits”… proche des sans voix, des sans avenir, des sans moyens, des sans amour… Nous t’accompagnons de notre prière. Marie-Claude
Je suis ému en lisant ce témoignage assez particulier. Merci