Compostelle : l’expérience d’un chemin
Du 12 avril au 13 juin 2011, Odette, en année sabbatique, a réalisé son désir,
« un désir qui naît on ne sait comment, qui persiste et germe pendant de longues années »,
celui de vivre l’expérience du chemin de Compostelle en partant du Puy-en-Velay.
Elle nous partage ici ce qui l’a marquée le plus profondément,
au terme d’un chemin long de 1600 kms,
en compagnie de marcheurs venus de tous horizons.
Une marche en solitude
Qu’on soit seul ou accompagné, en finale, c’est l’expérience d’une marche en solitude, pendant de longues heures journalières, que je retiens. Chacun avance à son propre rythme, d’un pas ajusté au port de son sac-à-dos. Il est habité par ce qui fait sa vie et, sans nul doute, par des désirs, des peurs, des espérances pour l’avenir. Des visages, des situations remontent à la mémoire, des réflexions, des prières germent au long de la route.
« Compostelle, c’est une épreuve »,
Chaque jour aussi, les pieds, très précieux, sont l’objet des plus grands soins.
C’est l’expérience du corps avec ses limites, ses douleurs, ses lourdeurs.
Continuer le chemin exige alors ténacité, endurance, constance,
et volonté d’aller jusqu’au bout de ce qu’un jour on a décidé.
Certains, cependant, se résignent à s’arrêter plus tôt que prévu,
mais c’est souvent en prévoyant de poursuivre le camino un peu plus tard.
Un chemin de gratuité et de dépouillement
On se rend compte très vite qu’il est indispensable de marcher léger
En effet, les titres ou les fonctions exercées n’existent plus ou très peu.
Celui, celle qu’on croise, c’est d’abord l’homme, la femme, le jeune dans sa simplicité d’être,
qui a quitté les apparats, et qu’on rencontre dans une même situation de marcheur ou de pèlerin.
Ainsi allégé, le cœur est libre pour avancer et accueillir ce qui arrive :
Si le camino est un temps de solitude, il est aussi un temps de rencontres
avec des personnes de tous âges, toutes conditions, tous pays, hommes et femmes.
Ils sont jeunes, étudiants ou professionnels, ils sont jeunes retraités.
Ces personnes viennent de tous les coins de la planète :
pays d’Europe, Canada, Colombie, Brésil, Antilles,
Corée, Japon, Russie, Australie, Afrique du Sud…
Une belle mosaïque d’internationalité ! comme est fait le monde…
Chacun porte au cœur l’étincelle qui l’a mis en route et qui, pour une bonne part, reste son secret.
Les relations sont simples, elles se font de plain-pied, favorisées par une situation similaire de pérégrinant. On se croise, on fait un bout de chemin ensemble, on se dépasse, on se retrouve le soir ou quelques jours ou semaines plus tard, ou encore au bout du chemin. On partage un repas préparé ensemble, on se communique les nouvelles les uns des autres. La différence des langues est sans doute une difficulté mais elle n’est pas une barrière.
On expérimente là qu’on est tous habités par des sentiments et des désirs semblables, qu’on connaît des joies, des souffrances, des peurs, des espérances similaires. On est tous à égalité, « de la même chair », simples habitants du même monde. Ou, comme le dit l’Evangile du Christ, tous frères et sœurs. L’étranger est mon semblable.
Comme d’autres chemins ou d’autres expériences, le chemin de Compostelle est une école de vie. Par la place qu’il offre « à la vacance du temps, à ce vide bienfaisant où quelque chose de neuf, de non prévu peut advenir », ainsi que l’écrit J. Le Goff (Ouest-France 31/8/11, éditorial), il peut être bénéfique à une étape de la vie, professionnelle ou autre, où l’on désire voir s’ouvrir une nouvelle page.
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